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29/03/2024 date de fin
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J’ai habité le quartier Confluence à Lyon, je le quitte écœuré

Tribune / Confluence, un quartier-phare dans la ville, sorti de terre là où il n’y avait rien. Un symbole du dynamisme et de ce qui pourrait être la contemporanéité exemplaire de Lyon. S’agit-il d’un eldorado ? Pour Antoine, 30 ans, qui y a vécu de 2008 à ce jour, la réponse est non.

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L'aménageur du quartier de la Confluence a décidé de conserver quelques vestiges de l'époque industrielle © Laura Steen / Rue89Lyon

Il a pris la décision de quitter les lieux, fatigué de vivre dans un appartement où les malfaçons semblent être la règle, et dans un quartier qui n’est, selon lui, que la coquille d’une bulle spéculative immobilière. En bref, il ne veut pas être le dindon de ce qu’il voit comme une farce.

L'aménageur du quartier de la Confluence a décidé de conserver quelques vestiges de l'époque industrielle © Laura Steen / Rue89Lyon
L’aménageur du quartier de la Confluence a décidé de conserver quelques vestiges de l’époque industrielle. © Laura Steen / Rue89Lyon

Je suis arrivé à Lyon en octobre 2008, en ayant beaucoup de difficultés à trouver un appartement, puisque je travaillais en région parisienne et que je ne pouvais pas me déplacer pour visiter dès qu’une annonce m’intéressait. Ma compagne travaillait elle aussi ailleurs qu’à Lyon.

Nous avons entendu parler de la livraison du premier immeuble fini d’un quartier en profonde mutation, au sud de Perrache : Confluence.

La suite de l’histoire est simple. Nous y avons emménagé et avons donc habité à Confluence presque 7 ans. Nous y avons d’abord loué un T2 de 50 m², rue Seguin. A l’époque je me sentais pionner, je regardais le quartier se construire, j’avais une quarantaine de grues en face de chez moi. Puis en mai 2012, nous avons déménagé dans un T3 de 73 m², à quelques centaines de mètres, rue Casimir Périer, toujours en location, dans cette résidence joliment baptisée “Oasia”.

Il n’y avait pas plus optimiste que moi sur les perspectives d’évolution du quartier. J’ai quasiment tout vu se construire, en suivant avec attention l’actualité autour de tous les projets. J’ai arpenté la promenade des quais de Saône jusqu’à la pointe un nombre incalculable de fois, enthousiasmé par tout ce que je voyais sortir de terre. J’avais même tellement envie de participer au développement de cette partie de l’arrondissement, que j’ai participé à une campagne municipale en 2014.

Mais la vie de pionnier s’accompagne parfois de certaines concessions. Ceux qui me côtoient tous les jours m’ont souvent entendu parler de certains désagréments inhérents à une copropriété mal organisée. Souvent, on se dit qu’en étant patient les choses s’arrangeront. Qu’il suffit de laisser du temps au temps. Et il y avait tellement de choses nouvelles à découvrir et à apprécier dans la vie du quartier, qu’on finissait par accepter que tout ne tourne pas rond dans la résidence.

Eau chaude qui n’arrive pas, terrasse inondée : mon appart’, mes emmerdes

La terrasse inondée d'un appartement de la Confluence, au 15 rue Casimir Perier.
La terrasse inondée d’un appartement de la Confluence, au 10 rue Casimir Perier.
La porte d'entrée bricolée par le promoteur, parce que mal dimensionnée à la construction.
La porte d’entrée bricolée par le promoteur, parce que mal dimensionnée à la construction.

Notre interphone n’a jamais fonctionné, l’ascenseur extérieur est en panne depuis des mois, les horaires de l’éclairage extérieur n’ont jamais été réglés. Notre terrasse n’a jamais été isolée des infiltrations d’eau de l’étage du dessus. On peut aussi noter que le vent s’engouffre dans chacune des terrasses des appartements et que personne n’en profite vraiment.

Notre porte d’entrée a mis deux ans à être refaite à la bonne hauteur, l’agence de location nous a facturé une intervention de plomberie dans la salle de bain due à une mauvaise installation. Ce n’est pas fini : le thermostat de mon chauffage était inversé avec celui du voisin (quand il faisait chaud chez moi, chez lui on se gelait : on a passé notre temps à régler la température de l’un et de l’autre avant de nous rendre compte du problème).

Toujours histoire de rire (jaune), parlons de ce problème d’eau chaude : de grandes chaudières ont été installées loin de nos habitations et avant de voir sortir de l’eau chaude de notre robinet, il peut couler jusqu’à quatre litres d’eau. On a connu plus écologique comme système, alors même qu’il s’agit de constructions récentes qui devraient être à la pointe de la dépense énergétique maîtrise.

On a attendu 2012 pour avoir une boulangerie et 2013 pour avoir une pharmacie de quartier. Les écoles primaire et maternelle sont sous-dimensionnées -cette fois, il s’agit d’un problème politique d’anticipation de la part de nos élus.

Et j’en passe.

La folie de l’investissement locatif

Au-delà de ces considérations matérielles, je m’interroge quand même sur la pertinence de l’investissement de tous ces propriétaires en loi Scellier, qui n’ont jamais visité leur lot, même pas assisté à la livraison, jamais assisté aux assemblées de copropriétaires, jamais relancé le syndic sur ce qu’il ne faisait pas, et qui a juste eu l’impression de faire une bonne affaire avec une défiscalisation.

Les critiques les plus récurrentes à l’encontre du quartier concernent son accessibilité en transport en commun, ou la faible fréquentation du centre commercial. Je ne pense pas que ces deux arguments tiennent. D’une part parce que depuis la construction du pont Raymond Barre, et l’extension du T1, le quartier n’est plus un cul-de-sac. Et nous avons quand même accès à 2 lignes de tram, une gare SNCF et une ligne de métro !

Quant au centre commercial, je pense qu’il s’agit surtout d’un phénomène de déception lié au schéma de grandes enseignes qu’on retrouve partout ailleurs. C’est certain : il n’y a pas de plus-value à aller à Confluence pour y retrouver Mc Donald’s, Hippopotamus ou Footlocker. Ce n’est pas un défaut d’urbanisme ni du projet. C’est l’état du commerce en France.

Pour moi, ce qui aura été fatal pour Confluence et qui me pousse au départ, moi, le plus fervent défenseur du quartier parmi ses habitants, c’est cette folie de l’investissement locatif qui, amplifié par des promoteurs peu scrupuleux, aboutit à un tel ravage.

Salut, je pars dans le 8è arrondissement de Lyon

Mon optimisme est ruiné, rien ne sera jamais réparé. Nous partons. Nous avons acheté un appartement dans le 8ème, dans une copropriété de seulement 30 lots, dont les habitants sont majoritairement propriétaires. L’immeuble date de 2007 et sa résistance à l’épreuve du temps, en comparaison des constructions plus récentes de Confluence, n’a rien à voir.

Quant au prix, n’en parlons pas. Je m’inquiète vraiment pour les rares propriétaires occupants de Confluence qui cherchent à vendre, et qui mettent sur le marché des biens bâclés à des prix surévalués. Quand on regarde ce qui se fait ailleurs dans Lyon, on comprend pourquoi ces annonces restent plusieurs années affichées sur SeLoger.com !

Pour ceux qui restent locataires de cette galère, appréciez quand même la qualité de vie de votre environnement, le jardin d’Erevan, la place nautique, les quais de Saône, l’isolement du bruit (évidemment je parle ici de la phase 1, pas de la phase 2 côté A7). Tout ce que j’appréciais pendant les années que j’y ai passées. Tout cela aurait pu être tellement mieux, si les habitations avaient été à la hauteur des attentes, et du projet.

Et parce que je sais qu’il y aura toujours quelqu’un pour me dire que je me trompe, ou que j’exagère, en me citant en exemple que tout va bien pour eux, dans ce cas tant mieux pour eux. Mais je pense sérieusement qu’il s’agit d’une minorité.

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