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29/03/2024 date de fin
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Agents de la future Métropole de Lyon : « on est maltraités »

Les services du conseil général du Rhône ne sont pas un bastion revendicatif. A l’aune de ce constat, il faut apprécier la grève de ce jeudi 3 juillet déclenchéé par quatre syndicats de la collectivité. Au coeur des mécontents, la manière dont les personnels du Département sont transférés vers la future Métropole de Lyon, fusion du Grand Lyon et du département sur le territoire de la communauté urbaine, prévue au 1er janvier 2015.

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Devant le siège du conseil général, ils sont 500 agents (selon les organisateurs) à se réunir pour tenter de se faire entendre et de témoigner d’une grosse inquiétude. CGT, CFDT, CFTC et FO agitent le spectre d’un potentiel scénario « à la France Télécom » tant la souffrance est importante alors que s’engagent d’énormes restructurations.

 

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Rassemblement des agents du Rhône devant le siège du département. ©Laurent Burlet/Rue89Lyon

 

« On a le choix entre rien et rien »

Virginie est assistante administrative depuis 10 ans, aujourd’hui au sein de la direction du territoire de Meyzieu qui regroupe 9 communes.

Son territoire, à cheval sur le Grand Lyon et le futur Rhône, doit être divisé et les agents doivent choisir entre rester dans le nouveau département ou rejoindre la Métropole de Lyon.

« J’ai jusqu’au 8 juillet pour postuler sur de nouveaux postes. J’ai reçu une liste d’une dizaine d’intitulés de postes mais il n’y avait pas le contenu de ces postes, ni sur quel secteur ils sont. Nous posons des questions à notre encadrement mais ils ne savent pas nous répondre. »

En attendant sa nouvelle affectation, son poste a été supprimé mais son traitement continuera de lui être versé.

« Je vais me retrouver sans rien faire. Dans ce bordel ambiant, on nous dit qu’ »on construit avec nous en marchant ». Mais le problème c’est qu’on a le choix entre rien et rien. On a aucune info sur ces postes. On est maltraités. On aurait pu tout simplement retrouver notre poste au lieu d’avoir à repostuler ».

Puisque les agents du Rhône sont des fonctionnaires territoriaux (et ont donc la garantie de l’emploi), cette manière de procéder s’apparente à un grand jeu de chaises musicales, dans une usine à gaz :

« On ne sait ni sur quel secteur géographique on va travailler, ni quelle sera la nature de notre travail. Le Rhône prônait la spécialisation des agents maintenant, on nous parle de polyvalence ».

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La grève était appelée par la CGT, la CFDT, FO et la CFTC. © Laurent Burlet/Rue89Lyon

 

« Les services déjà épuisés du fait du sous-effectif chronique »

Absorption d’une partie du Rhône par le Grand Lyon oblige, il n’y a pour l’instant qu’une partie des agents du Rhône concernés par ces changements de postes. Au moins un millier d’agents du Rhône seraient concernés par ce dispositif appelé « passerelle emploi » sur les 4 000 agents que la future Métropole de Lyon va absorber.

Comme Virginie, ils peuvent travailler dans des territoires dits « mixtes » (car actuellement à cheval entre le Rhône et le Grand Lyon) ou bien dans les services centraux (RH, par exemple) qui feraient doublons avec le Grand Lyon.

Les résultats des affectations doivent être connues mi-septembre, a moins qu’ils ne soient avancés pour calmer les esprits. Les agents pouvaient formuler jusqu’à trois voeux.

Les responsables syndicaux décrivent un mauvais cocktail en cours d’élaboration. Laurence Margerit de la CGT :

« Les services sont déjà épuisés du fait du sous-effectif chronique et du grand nombre de postes vacants (on parle de 120 postes, ndlr). Le transfert des personnels vient ajouter une couche. Nous sommes tellement inquiets pour les risques psychosociaux que nous avons demandé une expertise sur le sujet ».

Les syndicats demandent au moins qu’on communique des fiches de postes et l’implantation des futurs services. Et surtout que les agents soient prioritaires sur leur propre poste.

Annabelle (prénom d’emprunt) travaille à Givors, un territoire qui va également être divisé entre le nouveau Rhône et la Métropole. Elle redoute surtout, si elle n’est pas reprise à son poste d’assistante médico-sociale, de devoir aller travailler l’autre bout de Lyon alors qu’elle habite dans la Loire :

« On est obligé de postuler sur notre propre poste. Nos chefs nous ont assurés qu’on seraient prioritaires mais il y a eu tellement d’ordres et de contre-ordres sur la Métropole qu’on veut des certitudes, par écrit. »

 

Quelle rémunération, pour quel temps de travail ?

Autre d’inquiétude : la rémunération. Depuis plusieurs mois, il est annoncé que les agents continueraient à bénéficier du régime indemnitaire de leur collectivité d’origine. Mais il ne s’agit que d’une période transitoire. A terme, il faudra un seul régime indemnitaire. Problème, il y a de grosses différences entre le Rhône et le Grand Lyon, globalement à l’avantage des agents de la communauté urbaine.

Et encore, ce n’est pas si simple. Par exemple, les travailleurs sociaux du Rhône craignent de perdre, avec cette fusion, leur « prime de territoire ».

Les syndicats demandent logiquement un « alignement sur le régime le plus favorable ». Refus catégorique du Grand Lyon qui estime qu’une telle harmonisation, par le haut, coûterait la somme de 20 millions d’euros par an.

En ces périodes de vaches maigres, notamment dû à la baisse drastique des dotations de l’Etat, le Grand Lyon ne veut pas faire marcher la « planche à billets » pour reprendre les termes de la vice-présidente en charge de la Métropole, Michèle Vullien. Des discussions ont été fixées pour décembre.

Les syndicats dénoncent également la volonté du futur président de la Métropole, Gérard Collomb (PS), de remettre en cause les accords sur le temps de travail du Grand Lyon et du Département. Agnès Brenaud de la CFDT :

« Le 30 juin, Gérard Collomb nous a annoncé vouloir revenir au minimum légal. Inacceptable. On ne peut se remettre autour de la table de négociations avant des propositions concrètes. »

Ambiance. La rentrée sociale s’annonce métropolitaine.

 

« Positionner la Métropole comme un employeur exemplaire »

En cette fin de premier jour de « grève métropolitaine », les deux collectivités, Rhône et Grand Lyon, ont réagi en publiant chacune un communiqué de presse. La rapidité et le détail de l’argumentaire montrent que le caractère hautement sensible de cette question.

Le Rhône a tenu à préciser que « ce transfert s’effectue au moyen d’un dispositif de mobilité construit conjointement avec le Grand Lyon. ».
Il est précisé que le dispositif « passerelle mobilité » qui oblige les agents à candidater sur un poste, concerne 1 400 agents.

« Les critères de sélection de ce dispositif , pour étudier et retenir les candidatures, ont été communiqués, en toute transparence, aux partenaires sociaux. »

Le département rejette la possibilité d’avancer l’examen des candidatures, comme demandé par les syndicats :

« Le Département a parfaitement conscience que cette attente suscite des inquiétudes. Il y est très attentif. Mais l’étude des candidatures ne peut se réaliser sérieusement et consciencieusement dans un délai plus court. »

Et de préciser pour rassurer ses agents :

« A compter de septembre : accompagnement individualisé des agents non retenus sur un de leurs voeux de poste, pour qu’ils puissent intégrer le Nouveau Rhône ou la Métropole sur les postes non pourvus, ainsi que ceux en situation spécifique. »

Du côté du Grand Lyon, le communiqué insiste sur la complexité du processus de transfert des personnels :

« Ce chantier est hors du commun par son ampleur : en janvier 2015, la Métropole de Lyon comptera en effet plus de 250 métiers différents provenant de toutes les fonctions publiques (Etat, territoriale et hospitalière) ».

La communauté urbaine, chef de file de la création de la Métropole, fixe le cap :

« Le 1er enjeu est avant tout de garantir au 1er janvier 2015, la continuité du service public et des prestations offertes aux usagers, tout en assurant à chaque agent de la nouvelle collectivité un poste, un salaire, un lieu de travail identifiés. »

Concernant le transfert des personnels, le Grand Lyon note que « sur les 8 700 postes de la future Métropole, la majeure partie des agents connaît dès à présent son affectation » :

« C’est le cas de l’ensemble des agents du Grand Lyon et de  tous les agents du département qui travaillent sur le territoire métropolitain (agents des Maisons du Rhône) ou ceux dont la compétence est intégralement transférée à la Métropole (agents des parcs et jardins, des voiries départementales rapides, de l’Institut départemental de l’enfance et de la famille, musée de Fourvière par exemple). Seuls les agents des services « centraux » du département ont été amené à formuler des vœux d’affectation : soit au Nouveau Rhône, soit à la Métropole. Une fois ce vœu formulé, ils ont pu se positionner sur les 900 postes ouverts par la métropole (dont 140 postes d’encadrement.) ».

Concernant le « deuxième enjeu de la transition » (les questions de la rémunération et du temps de travail des agents), le Grand Lyon dit « avoir souhaité ouvrir » des négociations avec les organisations syndicales :

« Dans l’attente des résultats de ces négociations, la loi prévoit en matière de rémunération, que tous les agents, qu’ils soient issus du Grand Lyon ou du département conservent à titre personnel leur régime indemnitaire et les avantages sociaux collectivement acquis : ainsi, au 1er janvier 2015, aucun agent ne perdra son régime indemnitaire. »

En matière de temps de travail, des négociations ont été ouvertes. Mais en attendant, « prenant en compte la situation d’agents du département qui étaient autorisés jusqu’à présent à travailler sur 4 jours, le Grand Lyon a d’ores et déjà acté que ces agents pourraient continuer à bénéficier de leur aménagement du temps de travail jusqu’au 31 août 2015 ».

Le Grand Lyon conclut : « les négociations (…) gardent bien pour objectif de positionner la Métropole comme un employeur exemplaire ».
Cela est dit.

> Article mis à jour le 4 juillet à 11h avec les communiqués du Grand Lyon et du département du Rhône

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