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Métropole de Lyon : la guéguerre avec la Région rebondit chez les patrons

Qui, de Rhône-Alpes ou de la future Métropole de Lyon, obtiendra le pilotage des politiques économiques ? Depuis quelques mois, Collomb et Queyranne s’étripent sur le sujet. Désormais, ce sont les représentants des patrons locaux qui leur emboîtent le pas.

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Avec le lancement, il y a près d’un an, du projet de Métropole de Lyon, à l’occasion de l’acte 3 de la décentralisation, les débats sont vifs pour savoir à qui reviendra la compétence économique.

Jusque là, le président de la Région Rhône-Alpes avait la majorité des leviers. Aujourd’hui il redoute de se faire tondre par Gérard Collomb. Jean-Jack Queyranne ne manque d’ailleurs jamais une occasion pour dire que la Métropole de Lyon ne doit pas « jouer perso » et que le pilotage des grands dossiers (notamment la promotion des entreprises à l’étranger) revient à la Région. Il l’a redit encore au site de l’Express ce mercredi.

Depuis ce début novembre, on assiste à un nouvel épisode, cette fois-ci chez les patrons lyonnais. L’objet de la querelle cette fois-ci n’est pas la création de la Métropole de Lyon mais les termes du débat sont très proches. Il s’agit de la réforme des chambres consulaires, qui prévoit, au contraire, une régionalisation de l’organisation des CCI. Pour les partisans d’une Métropole de Lyon aux pouvoirs économiques élargis, ce n’est pas acceptable. Car les CCI territoriales, comme celle de Lyon, perdraient en pouvoir au profit des CCI régionales.

 

Le duo Grillot-Collomb à l’offensive

Acteurs-de-l-Economie-UneDans un entretien paru dans le numéro de novembre d’Acteurs de l’Economie Rhône-Alpes, c’est le président de la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Lyon, Philippe Grillot, chaud partisan de la « métropolisation », qui tire à boulets rouges sur cette réforme.

Pour Philippe Grillot, la régionalisation n’est pas la bonne option pour deux raisons :

  • Il faut être proche de « l’économie réelle » alors que cette réforme est « imposée par le national » et que l’ »économie réelle », à Lyon, va dans le sens de la métropole.
  • Les CCI régionales, explique-t-il, ont fait preuve de « coupable négligence » quand l’Etat leur a confié un « surplus de ressources ». Sous-entendu : les CCI régionales, dont celles de Rhône-Alpes, sont mal gérées.

Le président de la CCI de Lyon assume pleinement « le schisme » :

« C’est malheureux mais c’est ainsi. Le clivage est profond. (…) Deux clans se font face : l’un est animé par le duo Gérard Collomb – Philippe Grillot (sic), l’autre par le tandem Jean-Jack Queyranne – Jean-Paul Mauduy ».

 

Le Medef et la CGPME enfoncent le président de la CCI de Lyon

La réponse de l’autre « clan » ne s’est pas fait attendre. Le plus surprenant, c’est qu’elle est venue non pas de la CCI Rhône-Alpes mais du Medef et de la CGPME.

Chose encore moins habituelle, qui montre la profondeur du lâchage, les deux organisations patronales du Rhône ont rédigé un communiqué commun pour « désapprouver » les propos de Philippe Grillot et affirmer leur soutien à la régionalisation des chambres consulaires :

« Bernard Fontanel, président du Medef Lyon-Rhône et François Turcas, président de la CGPME du Rhône, soutiennent pleinement les actions menées par la CCIR et renouvellent leur confiance à Jean-Paul Mauduy pour mener à bien la (réforme de) réorganisation régionale du réseau consulaire, dans une optique de baisse des coûts et d’efficacité pour les entreprises du territoire ».

Et s’étonner :

« La violence des propos de Philippe Grillot est d’autant plus surprenante qu’elle ne correspond pas à ses votes. Le projet régional, qui permet de faire les économies en mutualisant les bons outils d’un riche réseau de 11 CCI, est un projet partagé. Toutes les décisions ont été votées à l’unanimité des membres, dont ceux de la CCI de Lyon ».

Ce mardi, dans un entretien au Progrès (payant), le président de la CCI de Lyon affirme que, malgré ce lâchage, il ne démissionnera pas. Il profite même de cette nouvelle tribune pour en remettre une couche :

« Je ne suis pas président des 8% que représentent la CGPME et le Medef. Maintenant, il y a des procédures qui peuvent se mettre en place, on verra bien ».

 

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Photo extrait du clip du groupe de rap 6-9 La Trik (dissous aujourd’hui). Crédit : Veni Vidi Movies

 

Au niveau régional comme métropolitain, la politique économique doit être rationalisée

Au-delà de cette guéguerre, il y a un enjeu de taille pour la bonne gestion des deniers publiques dont sont comptables ces représentants patronaux. Cela concerne particulièrement la promotion de Lyon ou de la Région Rhône-Alpes à l’international. Puisque les deux niveaux ont tendances à se parler de moins en moins, on arrive à certaines aberrations.

Philippe Grillot y va de son exemple dans son entretien à Acteurs de l’économie :

« Il y a 18 mois, Gérard Collomb et moi avons reçu une délégation de Pennsylvanie (un Etat des Etats-Unis, ndlr). Un représentant de la Région Rhône-Alpes assista à l’événement. Cet été, cette même Région Rhône-Alpes a organisé un déplacement dans l’Etat américain… sans même que le Grand Lyon ou la CCI de Lyon n’y soient associés ! Dans le double contexte de crise que traversent les entreprises et de restriction budgétaire auquel toutes les collectivités sont assujetties a-t-on les moyens d’une telle gabegie ? Non. Elle est même coupable ».

La réponse du Medef et de la CGPME a été claire : s’il y a des économies à faire sur le sujet, cela doit passer par le niveau régional. Les deux organisations patronales affirment même que la mutualisation est en bonne voie :

« Le dispositif « CCI International » est l’illustration des bénéfices de la Régionalisation en matière de mutualisation des moyens et des ressources. Cette structure est le premier opérateur de l’Equipe Rhône-Alpes de l’Export ».

Les deux organisations patronales affirment même que « la cacophonie a cessé » et que le mérite en revient à Jean-Paul Mauduy, le patron de la CCI régionale qui « a permis que l’ensemble des acteurs au niveau régional organisent ensemble leurs actions à l’international ».

En matière de cacophonie, ce nouvel épisode de la guéguerre entre les tenants de la future Métropole de Lyon et les partisans de la régionalisation est pourtant un bel exemple.


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