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29/03/2024 date de fin
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Tensions à la prison de Roanne : une vidéo de l'intérieur

La lettre du prisonnier

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Depuis six mois, le centre de détention de Roanne est le théâtre d’accrochages entre détenus et surveillants de plus en plus violents. Plusieurs prisonniers réclament des améliorations de leur vie en détention, tandis que les personnels dénoncent un projet pénitentiaire biaisé. La semaine dernière, une vidéo a été tournée dans l’enceinte de la prison, montrant une promenade qui se termine en rixe dans la cour.

Reçu à la rédaction dimanche, le film a été tourné par des détenus à l’aide d’un téléphone portable. La scène s’est déroulée mercredi 4 juillet, en fin de journée, à la fin d’une promenade dans la cour de la prison de Roanne.

Dans les images, sept surveillants dont six portent casque, coque, bouclier (la tenue d’intervention classique) font face à quatre détenus. Quelques coups sont échangés. Les détenus refusent de rentrer dans les bâtiments. Les surveillants plaquent l’un d’eux au sol et tentent d’attraper les autres.

Mickaël Escolano, surveillant à Roanne et syndiqué UFAP, confirme les faits.

« Il y a eu refus de réintégration de promenade. Ils ont été plaqués au sol, menottés et réintégrés en cellule », raconte-t-il.

Dans un texte parvenu avec la vidéo, les détenus de Roanne dénoncent la méthode et donnent leur version :

« La procédure d’intervention de l’administration pénitentiaire n’est pas respectée et l’action menée à la cow-boy mais sans lasso. (…) A 18h45, les quatre détenus refusent de remonter en cellule et demandent à être entendu dans un esprit pacifique. Boyer (Georges Boyer, le directeur du centre de détention, ndlr) préfère lâcher ses chiens. »

 

 

Mickaël Escolano n’est pas loin d’être d’accord, au moins sur la violence de la scène :

« Ca a dégénéré en combat de rue. »

Pour les détenus, ce face-à-face musclé est l’une des conséquences et le point d’orgue d’un processus de revendications non-entendues. Elles portent sur « une modification des horaires de promenade et sur toutes les précédentes revendications publiées le 25 avril 2012 par les détenus de Roanne ».

 

Une « révolte », selon leurs propres termes, qui serait liée à de mauvaises conditions de détention.

Dans la lettre (publiée sur rue89lyon.fr), ils parlent de tarifs de cantines excessifs, dénoncent des mesures aléatoires de quartier semi-ouvert et fermé, et réclament l’arrêt de la mise à nu lors des fouilles de parloirs.

Et selon Mickaël Escolano, la situation s’est aggravée peu à peu, favorisée par des problèmes clairement identifiés.

 

Un Oz à la roannaise

Ouvert il y a quatre ans, le centre de détention de Roanne devait dans son programme pénitentiaire privilégier la réinsertion, en accueillant prioritairement les personnes en fin de peines longues, avec un cadre de vie spécifique : cellules avec douches individuelles, libre circulation dans les coursives de la prison durant une grande partie de la journée, sorties organisées à l’extérieur (canoé ou encore matches au stade de foot).

Mais Mickaël Escolano explique « qu’on y arrive pas » et parle de tensions qui ont augmenté ces six derniers mois avec, notamment, cinq agressions relativement graves en mai dernier :

« Il est impossible d’instaurer le dialogue avec les détenus, qui sont très demandeurs. Il devrait y avoir un surveillant pour 30 détenus mais là, il y a un surveillant pour 63 détenus. Vous vous rendez compte! Les coursives sont isolées, on devrait y circuler à deux surveillants, mais on n’est pas assez. On n’y est pas en sécurité alors on n’y va pas. »

Le centre de détention de Roanne n’est toutefois pas en surcapacité. Avec 550 détenus (dont 50 femmes), cette prison ne rencontre pas de problèmes de surpopulation. En revanche, elle subit ceux des autres prisons de la région.

« On a des gens qui n’ont pas le profil pour suivre le programme de réinsertion prévu à l’origine. On se débarrasse de gens qui sont dans des maisons d’arrêt et qui ont six mois de détention, on les met au milieu de gens qui sont en fin de longue peine. On devrait être plus sélectifs. Face à ça, les surveillants sont désarmés. »

Il décrit un Oz à la roannaise :

« Il y a du trafic, du racket, certains sont influencés par quelques caïds. D’autres n’osent pas sortir de leur cellule, on leur met la pression alors ils cèdent. Il doit y en avoir une vingtaine mais sur 500 détenus, c’est trop. C’est beaucoup trop. Dimanche on a trouvé un téléphone portable et 90 grammes de cannabis. »

L’administration pénitentiaire, contactée, n’a pas donné suite à notre demande.

 

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