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Malgré l’interdiction, l’extrême droite nationaliste maintient sa manifestation à Lyon

Ce jeudi, le préfet du Rhône a interdit la manifestation programmée à Lyon pour le samedi 23 juin par les Jeunesses nationalistes, un nouveau groupuscule d’extrême droite. Malgré tout, les organisateurs, Alexandre Gabriac et Yvan Benedetti, maintiennent leur appel à défiler. Le tribunal administratif a confirmé ce samedi matin l’arrêté préfectoral. La manif reste interdite.

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Gabriac et Benedetti juin 2012

Yvan Benedetti et Alexandre Gabriac lors de leur conférence de presse le 21 juin à Lyon ©Philippe Juste/Maxppp

« La révolte des souchiens contre le racisme anti-blanc ». Ce devait être le mot d’ordre de la deuxième manifestation des Jeunesses nationalistes, un groupuscule créé en octobre dernier par le conseiller régional Alexandre Gabriac, suite à son exclusion du Front national pour des saluts fascistes. Un mouvement qui se situe dans le giron du mentor de Gabriac, Yvan Benedetti, le président du parti pétainiste, l’Oeuvre française.

Comme pour la manifestation programmée le 2 juin dernier par des « nationalistes autonomes », le préfet du Rhône, Jean-François Carenco, a interdit le défilé.

Il y a d’abord eu discussion sur les parcours. Les deux organisateurs voulaient traverser le quartier cosmopolite de la Guillotière, symbole, pour eux, de ces « territoires à l’abandon où les blancs sont minoritaires ».

Au final, la préfecture du Rhône a préféré interdire la manifestation suite, notamment, à la déclaration d’une contre-manifestation à l’initiative du Collectif de vigilance contre l’extrême droite*. Contre-manifestation également interdite. Dans un communiqué, la préfecture du Rhône explique qu’il souhaite ainsi prévenir les « troubles graves que ces rassemblements font peser sur l’ordre public » :

« Organisée par l’extrême droite radicale, cette manifestation devait emprunter des espaces publics très fréquentés en fin de semaine. De nombreux débordements ont été à déplorer lors des rassemblements précédents organisées par la même mouvance ».

« La deuxième interdiction concerne la contre-manifestation déclarée (…) le même jour et aux mêmes horaires que le rassemblement des « jeunesses nationalistes ». Cette mesure d’interdiction a pour but d’empêcher les affrontements qui pourraient être très violents entre les participants aux deux manifestations projetées ».

« On ne pourra pas endiguer les gens venus manifester »

Mais c’était sans compter sur l’acharnement et la stratégie de communication d’Yvan Benedetti et d’Alexandre Gabriac. Lors d’une conférence de presse organisée ce jeudi, tous deux ont contesté l’interdiction et ont annoncé avoir déposé un recours devant le tribunal administratif qui devrait se prononcer en urgence.

D’ici la décision du tribunal (samedi matin, selon Benedetti), les organisateurs ne veulent surtout pas annoncer que la manifestation est interdite. Résultat : même si le tribunal confirme la décision du préfet du Rhône, il y aura certainement de nombreux crânes rasés dans les rues de Lyon. Alexandre Gabriac qui dit compter sur « un millier de personnes », veut en effet « attendre le dernier moment pour envoyer des messages » :

« On a un problème technique pour appliquer les réquisitions du préfet. C’est un appel national à manifester, explique Alexandre Gabriac. On a diffusé plus de 10 000 tracts et on a fait une grosse publicité sur Internet. Ça va être difficile pour nous d’endiguer les arrivants sur Lyon ».

Yvan Bendetti va plus loin :

« Les autorités veulent interdire cette manifestation, nous nous dégageons de toute responsabilité. »

En clair, s’il y a des violences samedi de la part d’individus se réclamant de la mouvance nationaliste, ce ne sera pas de leur fait mais plutôt de celui de l’Etat. Leur logique est la suivante : en interdisant les manifestations, le préfet prive des gens d’une « soupape de sécurité pour faire baisser la tension » :

« Il existe une colère. Nous qui sommes au contact de cette jeunesse qui ne supporte plus d’être traitée comme des étrangers dans leur propre pays. A partir du moment où cette colère ne peut pas s’exprimer naturellement, notamment à travers les manifestations, elle va s’exprimer par des moyens détournés ».

Avec ou sans « soupape », la violence d’extrême droite s’est installée

Et concernant ces « moyens détournés » évoqués par Yvan Benedetti, plusieurs ont déjà été relevés par la police et par des habitants de différents quartiers.

Depuis janvier 2010, on note, à Lyon, la multiplication d’agressions et de dégradations qui portent la marque de l’extrême droite, notamment dans le Vieux Lyon.

C’est dans ce quartier qu’ont eu lieu les deux derniers cas connus de violence.
Le premier implique le meneur des Jeunesses nationalistes lui-même : Alexandre Gabriac est poursuivi pour des « menaces de mort » à l’encontre de deux employés d’un pub d’où il s’était fait exclure le 23 mai.

La second cas concerne le saccage de la terrasse d’un bouchon lyonnais, dans la nuit du vendredi 8 au samedi 9 juin. Selon le gérant, le bouchon s’est fait « attaquer » parce que lui-même est d’origine maghrébine :

« Ils ont commencé par gueuler « la France au Français, la France aux blancs » puis ils sont revenus à une dizaine pour balancer les tables et les chaises. »

Le gérant nous raconte également avoir chassé les « assaillants » non sans mal puisque certains étaient armés de « barres de fer » et « chaînes de vélos », selon lui. Un des employés serait allé à l’hôpital pour se faire poser « neuf points de suture » sur le crâne. Une plainte a été déposée.

Yvan Benedetti, même s’il rejette la paternité de l’acte, ne « condamne pas » ce type de violence et « l’explique » même en répétant à nouveau :

« Aujourd’hui, il y a une colère qui monte et on la voit s’exprimer ».

« Seuls les fachos devaient être interdits »

Le Collectif de vigilance contre l’extrême droite s’est « félicité » dans un communiqué de la manifestation des Jeunesses nationalistes et parle même de « victoire du 21 juin ».
Les organisations de gauche membre de ce collectif mettent cette décision du préfet sur le compte de « l’action déterminante » des habitants et commerçants des quartiers proche de la place Guichard et de la Guillotière (d’où devait partir initialement la manif d’extrême droite) qui ont, nombreux, appelé la préfecture pour « manifester leur inquiétude et leur indignation ».

Le Collectif « prend acte » de la décision du préfet et n’appelle plus à une contre-manifestation place Guichard. Pour autant, il tient à exprimer son « indignation » contre la décision du préfet d’interdire leur rassemblement :

« En lui appliquant le même traitement que les groupes factieux de la « révolte des souchiens » alors que les groupes qui le composent luttent quotidiennement pour l’extension des libertés, le préfet a commis une grave erreur d’appréciation : nous ne pouvons pas accepter d’être assimilé-e-s à des fascistes ».

Le Tribunal administratif rejette le recours de l’extrême droite

Ce samedi matin, le tribunal administratif, saisi en référé, a rejeté le recours des organisateurs nationalistes et donc confirmé la décision du préfet d’interdire la manif d’extrême droite nationaliste de ce samedi. A 13h, Alexandre Gabriac était injoignable.

Sur le site Internet des Jeunesses nationalistes, Gabriac appelle toujours à un rendez-vous à 14h30 place Guichard.

*Collectif 69 de Vigilance contre l’Extrême-Droite : MFPF, RESF, CGA, CNT, Sud éducation, Solidaires, la CGT vinatier et CGT éducation, CRASS, PG, le PIR, NPA, GU, PS, PCF, SOS Racisme, LDH, le CRI, UJFP, Les Voraces, La Rafal, Résistance Citoyenne Ouest Lyonnais, Ras l’Front, MRAP, Jeunes Ecologistes

Mise à jour

Article mis à jour le 22 juin à 10h suite au communiqué du Collectif de vigilance contre l’extrême droite

Article mis à jour le 23 juin à 13h20 suite à la décision du tribunal administratif de Lyon

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#Alexandre Gabriac

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