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29/03/2024 date de fin
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Dans l’Est du Rhône, droite extrême contre extrême droite

Entre le FN et les députés (UMP) de la Droite populaire, où passe la ligne de fracture ? Dans la 13e circonscription du Rhône, le député sortant Philippe Meunier compte sur son discours très droitier pour éliminer le candidat frontiste au premier tour, et ainsi éviter une triangulaire là où Marine Le Pen a réalisé 20,27% des suffrages en mai dernier.

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« Philippe Meunier et le candidat FN ont les mêmes arguments. Mais le Front National est plus dure, avec une connotation raciste ».

Ainsi s’exprimait un sympathisant UMP à la retraite, à la sortie de la première réunion publique organisée par le député sortant de la 13e circonscription à Décines, le 23 mai.
Philippe Meunier, cofondeur du Collectif parlementaire Droite populaire de l’UMP, doit éviter une triangulaire avec le FN. Sinon, il pourra dire au revoir à ses espoirs de réélection. Il l’avait fait en 2007 pour sa première élection, en éliminant dès le premier tour le chef de file de l’extrême droite régionale, Bruno Gollnisch.

Mais il avait pu bénéficier du net recul du vote FN. En 2012, Marine Le Pen a réalisé ici l’un de ses meilleurs scores départementaux avec 20,27% des voix.

Mais ne dites pas à Philippe Meunier qu’il fait de l’électoralisme pour « chasser » les voix du Front National. Il suit toujours la ligne qui est la sienne depuis 2007, comme le décrit Michel Forissier, secrétaire départemental de l’UMP et dont Philippe Meunier a été directeur de cabinet à la mairie de Meyzieu :

« Il n’est pas FN mais il défend une France où les valeurs de la nation française sont essentielles ».

Présidentielle 2012 Meunier et Guéant à Meyzieu

Meeting de Claude Guéant le 30 avril à Meyzieu à l’invitation de Philippe Meunier (à gauche). Crédit : Maxppp

 

« Ils n’ont qu’à prendre l’avion »

Insécurité, droit de vote des étrangers et immigration, Philippe Meunier s’appuie sur ce triptyque pour battre la campagne, reprenant les principales propositions droitières développées par Nicolas Sarkozy lors de l’élection présidentielle.
Le titre principal du tract est clair : « Ma priorité : notre identité, la France ».

Devant une centaine de personnes réunie dans la salle des fêtes, il a donc décliné ces thématiques, à l’occasion de sa dernière réunion publique, ce mercredi 23 mai.
Sur l’insécurité, il a attaqué, sans surprise, la nouvelle ministre de la Justice Christiane Taubira, nouveau bouc émissaire de l’UMP, accusée de laxisme :

« Les lascars d’1 mètre 90 vont être jugés par des juges pour enfant. On va les traiter comme des mineurs. »

Quant au droit de vote des étrangers aux élections municipales, il agite le spectre du contrôle des votes par des « puissances étrangères » :

« Je ne reconnaîtrais pas le résultat des urnes si les étrangers ont le droit de vote car un maire élu par des électeurs étrangers est un maire sous tutelle de puissances étrangères. Je ne vous parle pas des communes de l’Ouest lyonnais mais de Vaulx-en-Velin, Saint-Priest, Saint-Fons ou Vénissieux. La démocratie, ce n’est pas ça. Quand des puissances étrangères se mettent dans des élections pour défendre leurs propres intérêts, nous ne sommes plus en démocratie ».

Du droit de vote, il a glissé sur la thématique d’un mode de vie « à la française » qui seraient remis en question par l’immigration :

« L’assimilation et même l’intégration ne fonctionnent plus. Dans nos rues, vous avez vu, on a plus en plus femmes voilées ou d’hommes qui se baladent en djellaba. J’ai rien contre les djellaba. Mais j’aime les voir quand je suis en vacances au Maghreb. Ici, c’est l’Europe, pas le Maghreb ».

La conclusion de son argumentaire est simple et fortement applaudie :

« S’il y en a qui ne veulent pas comprendre, l’aéroport n’est pas loin, ils n’ont qu’à prendre l’avion ».

« Mon responsable de campagne s’appelle Mohamed »

A ceux qui lui reprochent d’épouser les thèses du Front National, Philippe Meunier répond qu’il est pour l’« assimilation » car « il y a des façons de faire pour mettre un coup d’arrêt à l’immigration ». Et il prend l’exemple du responsable de sa campagne pour la ville de Décines :

« Il s’appelle Mohamed Rabehi. Il fait tout ce qu’il faut pour être intégré. Il ne doit pas être responsable de ce que les autres font. Les autres, ça ne me gêne pas de les mettre dans l’avion ».

S’il considère que le FN mène « la politique du pire » en voulant faire « gagner la gauche », Philippe Meunier veut également se placer sur le terrain des valeurs pour marquer sa différence avec l’extrême droite :

« Nous n’avons pas le même code génétique. Les fondateurs du Front National sont issus de la collaboration alors que nous sommes issus du gaullisme, c’est-à-dire de la Résistance. Et quand Marine Le Pen va danser à Vienne avec des néo-nazis, on ne peut pas dire qu’elle a rompu avec cette tradition là ».

Pour lui, il n’y a donc pas de négociation, ni d’accord possible avec le FN.

Son futur, il le voit toujours à l’UMP. Dans un parti où les idées de la Droite populaire seront devenues majoritaires. Il croit ce scénario possible quand « les élus de l’Ouest de la France » seront confrontés aux « même problèmes » que les élus de l’Est (à savoir les membres de l’UMP élus à proximité des frontières et qui forment le gros des troupes de la Droite populaire) :

« Nous sommes attaqués par une mondialisation débridée et par l’absence de contrôle aux frontières qui met en péril notre sécurité et notre identité. Les élus de l’Ouest commencent à avoir cette situation sous leur nez et ils changent de discours ».

Pour le FN, il faut « préférer l’original à la copie »

André Pozzi, candidat FN sous la mention « Rassemblement bleu marine », fait campagne sur quasiment les mêmes thématiques que Philippe Meunier:

« C’est le combat pour notre identité nationale, la sauvegarde de nos traditions, de nos religions et de nos industries. Bref, tout ce que représente la France profonde. »

Mais cet « entrepreneur de 58 ans », comme il se présente, veut montrer sa différence :

« Pendant cinq ans, la Droite populaire n’a rien fait de concret. Nicolas Sarkozy a pompé le programme du Front National mais ne l’a pas appliqué. Ce sont des hypocrites. Les électeurs ne seront pas dupes, il préféreront l’original à la copie ».

« Hypocrite », Philippe Meunier l’est d’autant plus pour André Pozzi qu’il a, selon le candidat frontiste, soutenu la construction d’une mosquée à Meyzieu :

« Moi, je l’aurais refusée car il y a déjà une mosquée pour tous les Musulmans du Rhône. A l’époque, on nous avait dit qu’il n’y en aurait qu’une. Maintenant, il y en a de partout. On arrive à l’overdose ».

 

FN et UMP, « même programme » ?

Farida Boudaoud, candidate socialiste sur cette circonscription, s’en donne à cœur joie contre le député sortant qu’elle accuse d’avoir le « même programme celui du FN ». Dans un récent communiqué, elle a rappelé les états de service de la Droite populaire et de Philippe Meunier, suite aux attaques contre Christiane Taubira :

 

« Tout a commencé avec les « apéros saucisson vin rouge » à l’Assemblée nationale, en juillet 2011, un copier-coller des apéros Facebook initiés un an plus tôt par des groupuscules d’extrême-droite. L’UMP s’est pincée le nez, condamnant l’initiative du bout des lèvres, mais l’événement a fait le bus. »

Elle considère que derrière ses attaques contre les « femmes de la diversité » du gouvernement, c’est elle, la candidate socialiste dans la 13e circonscription qui est visée :

« Le but n’est pas de parler des sujets de préoccupation des citoyens, et surtout pas de perdre son temps à disserter sur les enjeux de la 13e circonscription du Rhône. Non, le but est simplement de pointer du doigt l’incompétence supposée des personnes issues de la diversité ».

Si Philippe Meunier ne parvient pas à convaincre une grosse partie des électeurs de Marine Le Pen, il a de fortes chances d’avoir droit à une triangulaire et de perdre son siège au profit de Farida Boudaoud, vice-présidente socialiste du Conseil régional. C’est ainsi que la maire de Saint-Priest, Martine David, s’était faite élire en 1997 et en 2002.

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